dimanche 11 novembre 2007

Les Etats-Unis assis sur un tas d'or noir: info ou intox?

Les Etats-Unis assis sur un tas d'or noir: info ou intox?

http://www.rue89.com/2007/11/07/les-etats-unis-assis-sur-un-tas-dor-noir-info-ou-intox

Dans les Rocheuses, à cheval sur trois états américains, dorment des stocks de pétrole colossaux: environ 2 trillions de barils, soit trois fois les réserves connues de l’Arabie Saoudite. L’info semble folle: si c’est vrai, pourquoi n’est-elle pas connue?

Un internaute nous ayant récemment interpellés à ce sujet, nous avons donc creusé. Pour tomber sur quelques perles française, comme cet internaute, qui flirte avec l’idée d’un complot américain destiné à dissimuler des réserves secrètes. La Chine, qui exploite déjà ce qu’on appelle en anglais le "oil shale" (schiste pétrolifère, ou bitumeux), s’emploierait elle aussi à cacher son trésor.

En fait, l’information est connue aux Etats-Unis depuis un bon siècle. Elle a pas mal agité les gouvernements avant et après chacune des deux guerres mondiales. Elle a coûté un paquet d’argent aux plus grandes sociétés pétrolières, sans que celles-ci n’aient jamais réussi à vendre une seule goutte de cette manne.

L’histoire a resurgit en 2005, lorsque Bush a autorisé certaines compagnies à reprendre des essais d’extraction dans les montagnes du Colorado, du Wyoming et d’Utha. Mais, à l’exception de quelques excités s’accrochant désespérément à la civilisation de l’or noir, cette nouvelle n’a agité ni les foules, ni les marchés boursiers.

Un grand saut technologique nécessaire pour rendre l'extraction rentable

Morceau de schiste bitumeux (DR).Car la mirifique production escomptée n’est pas près d’aboutir aux raffineries d’essence. En revanche, si l’exploitation de ces schistes bitumeux (techniquement il s’agit de roche et non d’huile) parvient à être un jour rentable et pas trop polluante, alors là, oui, "le monde sera sacrément secoué", pour citer le sénateur républicain Pete Domenici, qui rêve d’une mutation radicale de la géopolitique du pétrole. En attendant le grand saut technologique, les stratèges politiques doivent se contenter de fantasmer.

Les spécialistes parlent de sources "non conventionnelles" pour désigner les pétroles extraits par d’autres techniques que celle des puits. Entrent dans cette catégorie les sables bitumeux du Canada et du Venezuela (de plus en plus exploités), ainsi que ces fameux schistes des Rocheuses. Ces réserves non conventionnelles sont absolument énormes et se trouvent pour l’essentiel aux Etats-Unis. Elles pourraient en effet prendre le relais quand le pétrole "facile" sera tari. Gros problème: l’exploitation du pétrole rocheux a un coût prohibitif, tant sur le plan technique qu’environnemental.

Avec un prix du baril frôlant les cent dollars, le premier argument perd de sa force. Quant au second, tout dépendra du niveau de tolérance des Américains face aux nuisances qu’engendrerait une exploitation des schistes à si vaste échelle. C’est une chose d’accepter de saloper l’Alaska, une autre de bousiller l’écrin touristique des Rocheuses, et, surtout, de faire courir un danger mortel au fleuve Colorado et à son bassin, véritable ligne de vie de tout le sud-ouest d’Amérique du Nord.

"Des tas de raisons expliquent que personne n'ait jamais trouvé la bonne méthode"

Un article du New York Times de décembre dernier résumait bien la situation:

"Il y a des tas de raisons qui expliquent que personne n’ait jamais trouvé la bonne méthode, à la fois rentable et écologiquement acceptable, pour extraire le pétrole de sa roche. D’abord, les efforts précédents étaient trop chers et trop voraces en énergie pour concourir avec les ressources pétrolières conventionnelles.

"Mais surtout, ils ont laissé des déchets sur les terres, généré d’astronomiques quantités de polluants atmosphériques, et menacé le très chiche approvisionnement en eau d’une des régions les plus sèches des Etats-Unis."

Pourrait-on espérer mieux aujourd’hui, grâce aux progrès techniques? Les quatre sociétés (Shell, Chevron, EGL-Ressources et Oil Shale Exploration) qui, sur appel d’offre du gouvernement, ont été sélectionnées pour tester de nouvelles méthodes d’extraction s’accordent sur un point: les anciennes techniques minières sont passées de mode; il faut désormais chauffer la roche là où elle se trouve (610 mètres sous la surface), pour ainsi la fondre et la transformer en huile ou en gaz, avant de la pomper vers l’extérieur et de la raffiner.

Au final, le "bilan carbone" risque d'être lamentable

Dans tous les cas, vu l’importance des gisements (après tout, il s’agit de concurrencer l’Arabie Saoudite), des quantités d’énergie astronomiques seront nécessaires pour faire cuire ces schistes profonds, puis pour refroidir simultanément les eaux souterraines afin de ne pas briser les écosystèmes. Il faudra construire sur place des centrales électriques qui fonctionneront... au gaz, ou au charbon, ou à l’énergie nucléaire.

Comme nul n’est encore capable de stocker le CO2, le bilan carbone risque d’être lamentable. Enfin, le risque de contamination des eaux souterraines par des substances aussi sympas que l’arsenic et le sélénium panique d’avance les autorités sanitaires de l’Ouest.

Les protagonistes -sociétés pétrolières, élus locaux, autorités fédérales- ne font pas semblant d’ignorer les problèmes. Shell, qui n’a cessé de chercher à exploiter les schistes bitumeux des Rocheuses depuis un quart de siècle et est considéré comme le leader de la bande, n’envisage pas de démarrer une production commerciale avant, au mieux, la prochaine décennie.

Un fâcheux précédent près de Parachute, Colorado, dans les années 70

Les populations concernées par les projets, quant à elles, ne savent pas sur quel pied danser. Outre le spectre d’une transformation radicale de leurs paysages et mode de vie, elles n’ont toujours pas digéré la violente déconvenue de 1982, qui clôtura le dernier "oil shale boom" ("boom du schiste bitumeux") initié par Jimmy Carter pour contrer le choc pétrolier des années 70.

Exxon et la Tosco Corporation avaient investi un demi milliard de dollars dans l’élaboration d’une immense mine de schistes bitumeux près de Parachute (Colorado). Une ville avait commencé à sortir de terre, destinée à abriter 25 000 personnes. Le 2 mai 1982, journée baptisée depuis "Black Sunday", Exxon annonçait qu’elle arrêtait tout, licenciant du jour au lendemain 2 200 personnes, dont la plupart avaient déjà acheté leur maison. Le traumatisme est encore frais. Toutefois, personne ne combat les recherches en cours, comme si l’enjeu national, et même international, valait d’attendre de voir venir.

Des techniques d'extraction expérimentales. A la base, il y a le schiste, précurseur n’ayant pas été brûlé avec assez d’intensité, ou maturé assez longtemps, pour avoir pu se transformer en pétrole liquide. Changer le schiste en pétrole nécessite de le chauffer: soit en surface, après l’avoir extrait selon le minage classique, soit "in situ", à 600 mètres de la surface.

Shell va creuser des trous verticaux sur cette profondeur, et chauffer électriquement la roche, qui sera "cuite" tout doucement à 343° pendant deux ou trois ans. Pour protéger les eaux souterraines, Shell teste un "mur de gel" dans lequel la glace est générée par la circulation de liquides dans un réseau fermé de tuyaux.

La méthode de Chevron est encore en cours d’élaboration, avec le concours de l’université d’Utah et du laboratoire national de Los Alamos. Une piste consiste à creuser des puits d’injection pour faire circuler des gaz chauds au travers de la roche fracturée. Les caractéristiques propres à la configuration du schiste seraient utilisées pour prévenir les infiltrations de polluants dans les eaux souterraines, selon des techniques développées à Los Alamaos.

La méthode d’EGL est la plus simple de toutes : on enverra de la vapeur à 371°C, ou n’importe quel autre fluide bouillant, au travers d’un gigantesque et complexe radiateur creusé sous la formation de schiste. Des tuyaux pomperont les vapeurs et les hydrocarbures liquides vers la surface. Pour prévenir la pollution des eaux, EGL envisage de capter en continu les eaux issues de la zone d’extraction.

Dans tous les cas, résume un cadre de Chevron, "si vous utilisez les technologies du passé, attendez-vous à obtenir des résultats du passé. En employant des technologies contemporaines, vous pouvez escompter des résultats totalement différents."

Source: New York Times et Associated Press.

Mirages extravagants: quid du charbon liquide?

Rentable sans doute avec un barril à 150 ou 200 $? Ce qui ne va tarder?

Quid donc du charbon liquide? Il semble y avoir déjà une industrie efficace dans ce domaine, l'entreprise Sasol en Afrique du Sud étant en pointe.

Cf les liens suivant:
--> http://fr.wikipedia.org/wiki/Sasol

Sasol (en afrikaans Suid Afrikaanse Steenkool en Olie - Charbon et pétrole sud-africain) est une entreprise de l'industrie chimique basée en Afrique du Sud.

C'est la deuxième entreprise d'Afrique du Sud derrière old Mutual et la troisième entreprise d'Afrique[1].

Elles est spécialisée dans la transformation de charbon et de gaz naturel en hydrocarbures liquides selon le procédé Fischer-Tropsch.

--> http://www.infosdelaplanete.org/article.php?ID=1430

Plus propre que le pétrole, le charbon liquide
Emily Flynn Vencat pour Newsweek (Etats-Unis)
Le 11-01-2007 (Publié sur internet le 18-01-2007 )

Mise au point dans les années 1920, la liquéfaction du charbon fait aujourd’hui rêver les industriels de l’énergie, qui soulignent ses avantages économiques et environnementaux et multiplient les projets.

[Traduction : Courrier International]

Des voitures alimentées au charbon ? A priori, ça sent la catastrophe pour l’environnement. Or, si les experts ne se trompent pas, une forme liquéfiée de ce minerai à la très mauvaise réputation devrait servir de combustible dans nombre de transports du monde entier d’ici une vingtaine d’années. Grâce au charbon liquide, qui est au minerai ce que l’or est au plomb, automobiles, trains et même avions conçus pour fonctionner au pétrole pourraient changer de carburant. Au profit d’une énergie, nous disent ses plus ardents défenseurs, verte, économique et disponible en quantité.

Le charbon liquéfié n’a rien d’une nouveauté. Mis au point pour la première fois par des chercheurs allemands dans les années 1920, il alimentait déjà la machine de guerre nazie. Mais, jusqu’à une date récente, le coût de la liquéfaction du charbon (une technique connue sous le sigle CTL, de coal to liquid [c’est-à-dire un mélange de monoxyde de carbone issu de la combustion incomplète du charbon et d’hydrogène, qui permet d’obtenir des hydrocarbures liquides]) restait prohibitif : jusqu’en 2003, le prix du baril de pétrole tournait depuis vingt ans autour des 25 dollars et le charbon liquéfié, avec ses 45 dollars, ne présentait aucun intérêt économique. Mais aujourd’hui, avec un pétrole au-dessus de la barre des 60 dollars et l’environnement placé en tête des priorités mondiales, le charbon est en passe de devenir la meilleure option pour garantir la sécurité énergétique d’un pays, échapper au cours élevé du pétrole et lutter contre le réchauffement climatique. Le CTL a tous les atouts pour répondre aux impératifs économiques et écologiques de 2007 et des années à venir, souligne Steve Knell, directeur de l’analyse énergétique chez Global Insight.

Un avis qui semble largement partagé, au vu des milliards de dollars que représentent les contrats passés récemment sur le charbon liquide. La production mondiale de charbon liquéfié devrait passer de 150.000 barils par jour actuellement à 600.000 en 2020, pour atteindre 1,8 million de barils quotidiens en 2030. En Chine, la filière reçoit aujourd’hui quelque 25 milliards de dollars d’investissements. Sasol, la société sud-africaine qui fait autorité dans le monde en matière de CTL, y fait actuellement construire deux usines à charbon liquide, pour un coût de 6 milliards de dollars l’unité, dans la région autonome du Ningxia et dans la province du Shaanxi. L’entreprise publique Shenhua Group, qui s’apprête en 2007 à lancer la production dans la première usine CTL chinoise, aurait déjà dépensé quelque 7,5 milliards de dollars.

Le charbon liquide serait 30% plus propre que l’essence

Aux Etats-Unis, au moins neuf Etats envisagent sérieusement de se lancer dans le charbon liquide. Des sénateurs de l’Illinois et du Kentucky étudient un projet qui permettrait aux usines CTL de bénéficier de garanties bancaires et d’incitations fiscales. En octobre dernier, le gouverneur du Montana, Brian Schweitzer, a annoncé que son Etat allait bâtir la première usine CTL verte pour 1,3 milliard de dollars. Le CTL pourrait bien un jour fournir l’ensemble du carburant pour les transports aux Etats-Unis, s’enthousiasme Eric Stern, conseiller du gouverneur.

L’Afrique du Sud fait la preuve à grande échelle que le charbon liquéfié fonctionne. En raison des sanctions antiapartheid, qui limitaient son accès au pétrole étranger, le pays compte déjà des infrastructures de pointe en matière de CTL. Sasol, entreprise semi-publique, couvre 30% des besoins énergétiques dans les transports en Afrique du Sud. C’est un exemple à suivre, quand on sait que la plupart des pays les plus gourmands en énergie sont aussi les plus riches en charbon. Le charbon liquide ne va pas remplacer le pétrole brut, précise Pat Davies, le PDG de Sasol, mais il peut faire une énorme différence dans des pays comme la Chine, l’Inde ou les Etats-Unis.

Les Etats-Unis, qui abritent les plus importantes réserves du monde, ont assez de charbon pour alimenter le pays pendant au moins un siècle. La Russie, la Chine et l’Inde sont presque aussi bien placées. Et, à en croire les partisans du CTL, le charbon l’emporte sans conteste sur la coqueluche actuelle des capital-risqueurs de l’énergie que sont les biocarburants dans les comparatifs en termes de disponibilité et de rentabilité. Aux Etats-Unis, par exemple, les producteurs d’éthanol consomment actuellement 14% des récoltes annuelles de maïs pour ne couvrir que 2% des besoins du pays en carburant.

Et le charbon liquide a aussi des arguments écologiques qui tiennent la route. Si les usines de CTL à l’ancienne, comme celles en service en Afrique du Sud, sont de grandes pollueuses, la plupart des nouvelles infrastructures sont des modèles en matière d’écologie. Les techniques artificielles de stockage géologique du carbone [qui consiste à enfouir le dioxyde de carbone dans des cavités souterraines hermétiques] permettent de piéger et d’enterrer les émissions de CO2, qui ne s’échappent donc pas dans l’atmosphère. Grâce à cette séquestration, une voiture alimentée au charbon liquide serait environ 30% plus propre que si elle roulait à l’essence. Le vieux roi charbon pourrait bien connaître une cure de jouvence.

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